Vous retrouverez ici un dossier complet sur tous les aspects du potentiel futur coach de l’OM. C’est très approfondi (donc long) et c’est volontaire, si vous souhaitez quelque chose de plus synthétique, lisez les 2-3 premières lignes de chaque paragraphe, vous comprendrez les grandes lignes de son idée.
Tout d’abord connu pour sa carrière de joueur sur laquelle on ne s’attardera pas ici, l’entraineur argentin est notamment passé par l’AS Monaco, le PSG et River Plate. Évoluant au poste de n°10, il prône un football très offensif qu’on abordera plus tard. C’était un joueur très intélligent, et il n’a pas perdu cette qualité. “Si vous voulez en savoir plus sur le football, ouvrez la tête de Gallardo”, a déclaré un jour l'ancien entraîneur argentin Alejandro Sabella*. ”Vous trouverez une encyclopédie illustrée sur le football.”* On va se concentrer ici sur ses exploits à River Plate et dans quel contexte !
Le 7 juin 2014, River Plate vient de remporter le titre en Argentine mais son coach, Ramon Diaz, annonce son départ. Les supporters sont tristes, dégoutés malgré l’obtention d’un trophée obtenu après 6 longues années de disette. ”El muñeco” se voit alors nommé à la tête d’une institution historique, entourée de beaucoup de ferveur. River Plate vient seulement de retrouver la première division, trois ans après avoir vécu l’enfer d’une relégation, la seule de son histoire.
Son discours est simple et il expose quelques idées “joueur, ma seule obsession était le but adverse, je ne vais pas changer ma façon de penser, mon équipe sera une équipe qui attaque, qui sait aussi défendre, mais avec une culture footballistique dans laquelle les hinchas de River se reconnaîtront”. De beaux discours, qui collent beaucoup avec la philosophie de Longoria énoncée en conférence de presse "Ici à Marseille, il faut un style spécial. On doit faire du Vélodrome une force, pas une faiblesse. Pour que ce soit fait, on a besoin d'un jeu offensif et des transitions rapides. Du piment dans le jeu. On l'a vu dans le passé ou même cette saison dans quelques matchs”. Mais personne alors ne peut deviner à quel point Marcelo Gallardo va radicalement transformer le club qui l’a formé.
À une époque où les lignes de palmarès sont utilisées comme critère principal pour juger de la valeur d’un technicien, on va rapidement parler du roman que possède Marcelo Gallardo : Dès le premier tournoi continental, la Copa Sudamericana (2014), un sans faute : huit victoires et deux matchs nuls pour décrocher le premier titre continental du club depuis que Marcelo Gallardo et Enzo Francescoli avaient levé ensemble la Supercopa Sudamericana dix-sept ans plus tôt. L’année 2015 sera marquée par les succès en Recopa Sudamericana, la première Copa Libertadores, le trophée le plus important d’Amérique Latine ainsi que la Copa Surugabank. Il est la même année finaliste de la Coupe du monde des clubs, perdue contre le grand Barça de Luis Enrique. 2016 ne déroge pas à la règle, emmené par Driussi et Alario, River s’offre la Recopa Sudamericana face à Santa Fe et la première Copa Argentina de son histoire au terme d’une folle finale remportée 4-3 face à Central. L’années 2017 sera moins prolifique : seulement une nouvelle Copa Argentina et en 2018 une Supercopa Argentina, ****coupe qu’il n’avait pas encore gagnée ainsi qu’une nouvelle Copa Libertadores. En 2019, il a encore gagné une Copa Argentina, sa troisième ainsi qu’une troisième Recopa Sudamericana et une nouvelle finale en Copa Libertadores, perdue contre le Flamengo de Gerson. Enfin pour couronner le reigne du “Napoleón” (surnom de Gallardo), il remporte en 2021 le seul titre qui lui manquait : le championnat (de la Liga Profesional del Fútbol Argentino) ainsi que le Trofeo de Campeones de la Liga Profesional. Sacré au terme d’un tournoi totalement maîtrisé, el Muñeco a finalement dirigé dix-sept finales sur le banc de River, en a gagné treize.
Le bilan est encore plus impressionnant : Gallardo a dirigé 75 duels éliminatoires avec River Plate, il en a passé 59, soit un pourcentage de réussite en face à face de 79% quand le total historique du club avant son arrivée était de 62%. En compétitions internationales, sur les trente-six disputés, son River n’en a perdu que huit, l’élimination face à l’Atlético Mineiro ****marquant une première en 2021 avec une défaite à l’aller et au retour. En sept ans et demi au club, Marcelo Gallardo a remporté 14 trophée, dont 7 des 12 titres internationaux décrochés par le club dans toute son histoire, devenant l’entraîneur le plus titré de l’histoire du club.
Un palmarès d’autant plus impressionnant que River n’a jamais été une équipe de Coupe, un grand stigmate traîné par le club aux 35 championnats, qui lui vaut même le surnom de Gallina (poule, tendance mouillée). "Gallardo a réfléchi à ce phénomène, et je crois que sa méthodologie de travail, où chaque entraînement se déroule avec l’intensité d’un match, permet à River de mieux gérer ces rendez-vous couperets où la marge d’erreur est réduite au minimum" déclare un journaliste argentin*.*
Au total, Marcelo Gallardo a remporté 196 des 370 matchs qu’il a dirigés avec River, pour 101 matchs nuls et 73 défaites. En d’autres termes, el Muñeco a remporté 62% des points qu’il lui était possible de prendre. Stratosphérique. Pour ceux qui sont encore septiques sur son passage à River Plate, je vous invite à relire le contexte dans lequel il récupère le club, tout en lui faisant gagner la plupart de ses trophées et en faisant preuve d’une longévité et adaptation impressionante. Depuis peu, une statue de bronze à son effigie est présente devant le Monumental. Il est d’ailleurs représenté avec une énorme paire de… “cojones”.
Il a la reconnaissance des plus grand comme Pep Guardiola qui avait aussi témoigné de son admiration pour El Muñeco, et s'était même étonné qu'il ne soit pas nommé parmi les trois meilleurs entraîneurs de l'année au prix "The Best" de la FIFA, “Chaque année, trois entraîneurs sont nommés comme les meilleurs au monde, et il n'en fait jamais partie. Je ne comprends pas. C'est comme s'il n'y avait rien d'autre au monde que l'Europe”.
La plupart des choses que vous retrouverez ici sont une synthèse de faits principalement issus de cet excellent article :
Pour saisir donc pleinement l'estime dans laquelle Gallardo est tenu par les fans de River Plate, il faut comprendre à quoi ressemblait le club lorsqu'il a été nommé.
Trois ans plus tôt, River avait donc été relégué en deuxième division pour la première fois de son histoire. Dans les coulisses, le club était le reflet de son histoire plutôt qu'une organisation de football moderne. Les installations étaient obsolètes, les finances précaires. Le terrain du Monumental, l'un des stades les plus historiques d'Argentine, était agité et usé.
Un nouveau président, Rodolfo D'Onofrio, savait que quelque chose devait changer. Lui et le directeur sportif Enzo Francescoli, une autre légende de River Plate, voulaient une figure de proue pour diriger un projet à long terme. Gallardo, légende de River Plate, qui était au chômage depuis deux ans après avoir remporté le titre uruguayen avec Nacional lors de sa première saison d’entraineur, a frappé en tant que premier choix.
Mais il n’aurait jamais pensé que cela durerait aussi longtemps. “J'espérais le meilleur. Mais après deux mois de travail, nous avions déjà établi un niveau d'empathie parmi le groupe de base de joueurs, le directeur sportif et surtout avec le président. Cela s'est produit avant que nous ne commencions à obtenir des résultats. Rodolfo D'Onofrio m'a dit : "Je veux que vous soyez ici pendant toute la durée de mon administration".”
Marcelo Gallardo s’est engagé pour pour un projet bien plus grand : “Nous avions à peine commencé, alors j'ai compris que je n'étais pas seulement lié aux résultats. Si c'est l'approche, je crois que de bonnes choses peuvent arriver. Vous avez besoin de temps pour travailler. Nous devions encore comprendre où nous allions, mais il y avait de l'enthousiasme et de la détermination à construire quelque chose qui nous rendrait heureux.”
Il s'est intéressé à tous les aspects de la vie à River, des jeunes aux installations de formation. Il y a des histoires de lui qui s'agite sur des petits détails, qui passe des heures libres à regarder l'équipe féminine et même l'équipe de hockey sur gazon de River. Il a insisté sur le fait que le président D'Onofrio se penchait sur l'avenir en investissant dans de nouveaux terrains et de nouvelles infrastructures.
Ce projet était un énorme chantier, d’une rénovation et d’une modernisation complète de toute l’institution de River Plate.
”La passion pour le football en Amérique du Sud est de très courte durée”, dit Gallardo dans cette entretien à The Athletic. “Les fans veulent gagner dimanche. C'est la seule chose qui les intéresse. Et cette façon de penser se transmet. Nous avions besoin d'une vision différente. Nous avons dû renforcer la structure du club en fonction de ce qui est nécessaire pour un club qui développe les joueurs : plus de structure, plus d'organisation. Je ne veux pas dire que ces choses n'existaient pas déjà, mais nous avons dû améliorer les choses, leur donner un coup de pouce. Heureusement, j'ai trouvé un groupe de cadres qui partageaient le même point de vue. Ils avaient confiance que nous créerions quelque chose qui nous rendrait plus forts. Mais cela n'arrive pas du jour au lendemain. Cela ne peut se produire que si un entraîneur reste dans un club pendant une période prolongée. Cela devient très difficile s'il y a un changement constant.”
Dès son arrivé, il va donc commencer les travaux. Tous les secteurs sont concernés. Le terrain, avec la pelouse du Monumental qui est maintenant équipée de systèmes électroniques qui détectent en temps réel son état, permettant de définir non seulement quels secteurs doivent être mieux irrigués, à quel niveau, mais qui donnent aussi des informations quant à la dureté du sol et livrent ainsi des données qui permettent de déterminer la vitesse du ballon (et ainsi adapter le système tactique), mais aussi quel types de crampons doivent être fournis aux joueurs.
La vie d’équipe est également concerné avec la modernisation du centre dans lequel les joueurs se réunissent lors des mises au vert ou des concentrations d’avant-match.
De plus, Marcelo Gallardo est entouré d’un large staff d’une vingtaine de personne dont une Sandra Rossi, adjointe sur laquelle on pourrait dédier tout un article. C’est une spécialiste de la médecine du sport et des neurosciences, elle travaille à l’optimisation du cerveau des joueurs afin de raccourcir leur temps de réaction, augmenter leur vision périphérique, augmenter leur capacité de concentration et à rendre plus efficace leur communication. Le rôle de Rossi pourrait être défini comme celui d’un "coach du cerveau”. Muscler les cerveaux, développer la plasticité neuronale afin de doper la plasticité de son équipe. “Les joueurs qui pensent mieux et plus vite, avec plus d’outils pour résoudre les problèmes, font la différence. Le moteur est la tête” a ainsi déclaré Gallardo.